Savez-vous ce que signifie « bonnardiser » ? On doit cette expression à Pierre Bonnard (1867-1947). Ce peintre français était connu pour son style impressionniste et ses couleurs vibrantes mais derrière la beauté de ses œuvres se cachait une obsession peu commune : il ne considérait jamais un tableau comme véritablement terminé. Cette manie l’a conduit à retoucher ses toiles même après qu’elles aient été exposées dans des musées ou vendues à des collectionneurs.
Bonnard et l’obsession de la retouche

Contrairement à d’autres peintres qui signaient leurs œuvres comme un acte final, Bonnard gardait toujours avec lui des pinceaux et une palette, prêt à modifier un détail ici ou là. Une anecdote célèbre raconte qu’il transportait même des petits tubes de peinture lors de ses visites dans des musées. Si l’une de ses toiles y était exposée, il n’hésitait pas à y apporter quelques touches supplémentaires, au grand dam des conservateurs ! En 1943, un journaliste raconte :
« Au musée de Grenoble puis au Luxembourg, il lui arriva de guetter le passage d’un gardien d’une salle à l’autre, de sortir d’une poche une minuscule boîte garnie de deux ou trois tubes et, d’un bout de pinceau, « d’améliorer » furtivement de quelques touches un détail qui le préoccupait. Et, son coup fait, de disparaître, radieux, comme un collégien après une inscription vengeresse au tableau noir… »
Son obsession du détail était telle qu’il pouvait travailler sur une même peinture pendant des années mais même après leur vente, il continuait à voir des éléments à améliorer.
Quand Bonnard « bonnardait » !
Cette pratique a donné naissance à l’expression « bonnarder » ou « bonnardiser » qui signifie retoucher une oeuvre que l’on a créée, parfois à l’insu de son propriétaire.
Cette obsession n’a jamais quitté le peintre. En 1945 il commence à peindre L’Amandier en fleurs qu’il retouche à plusieurs reprises. En janvier 1947, devenu trop faible pour peindre, il sollicite son neveu Charles Terrasse pour corriger une couleur et achever le tableau. Bonnard s’éteint quelques jours plus tard, le 23 janvier.

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Entre perfectionnisme et génie
Cette manière de peindre, à la fois méticuleuse et instinctive, lui a permis de créer des œuvres d’une profondeur rare. Son travail sur la lumière et les couleurs donne à ses tableaux une atmosphère intemporelle. Pourtant, ce perfectionnisme extrême lui a aussi valu des critiques. Certains estimaient qu’un artiste devait savoir s’arrêter, tandis que Bonnard semblait incapable de poser un point final.
Aujourd’hui, cette obsession est vue comme un témoignage de son génie. Ses toiles sont admirées pour leur subtilité et leur richesse chromatique. L’histoire de ses retouches clandestines, elle, participe à la légende de cet artiste.

Et vous, est-ce qu’il vous arrive de bonnarder ?!
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