Située dans le Doubs à quelques kilomètres de Besançon, la Saline Royale d’Arc-et-Senans fut l’une des plus grandes salines d’Europe du XVIIIe siècle. Conçue comme une usine-ville modèle, c’est l’un des chefs-d’oeuvre de l’architecte Claude-Nicolas Ledoux.
Symbole d’une industrie révolue et merveille patrimoniale classée à l’Unesco, la Saline Royale d’Arc-et-Senans est aujourd’hui un centre culturel dynamique. Découvrons son histoire…
Une histoire de sel
Si aujourd’hui le sel est un simple condiment, au XVIIIe siècle il avait beaucoup plus d’importance. A cette époque, il permettait en effet de conserver les aliments ce qui en faisait une denrée essentielle ; il avait aussi une grande valeur économique puisque son utilisation était soumise à un impôt, la gabelle.
La production de sel se fait principalement de deux façons : soit à partir du sel marin dans des marais salants ; soit à partir de sel de gemme (des cristaux). En Franche-Comté, c’est cette deuxième forme de sel que l’on trouve, formé dans une mer qui s’est retirée il y a des millions d’années. Ces cristaux, remontés à la surface suite à des mouvements géologique, viennent charger de sel l’eau douce qui ruisselle à son contact : c’est la saumure. Le sel peut alors s’extraire par évaporation en chauffant la saumure.
La construction d’une manufacture de sel à Arc-et-Senans
Depuis le Moyen Âge, il existait une saline dans la ville de Salins-les-Bains mais au XVIIIe siècle il faut augmenter la production. Le site de Salins présentait cependant deux défauts : le terrain n’était pas adapté pour édifier de nouveaux bâtiments et, surtout, on manquait de bois dans les environs, matériau indispensable pour entretenir le feu destiné à chauffer la saumure.
A quelques kilomètres de là, la ville d’Arc-et-Senans, située au milieu d’une forêt, répond aux exigences d’une nouvelle saline. Louis XV demande donc l’édification d’une Saline Royale et confie le projet à l’architecte Claude-Nicolas Ledoux. La première pierre est posée en 1775 et l’édifice est opérationnel dès 1779.
La Saline Royale d’Arc-et-Senans : une architecture qui ne laisse rien au hasard
Claude-Nicolas Ledoux formula un premier projet de forme carrée, avec des bâtiments ornés de 144 colonnes doriques mais cette vision luxueuse sera refusée par Louis XV pour qui les colonnes “ne conviennent qu’aux temples et aux palais des rois”.
Le second projet sera le bon : Ledoux l’imagine en forme d’arc de cercle, à la fois pour son aspect esthétique “La forme de la saline est pure comme celle que décrit le soleil dans sa course” mais aussi pour son aspect pratique. Dépourvue d’angles mort, cette forme limite les risques de vols.
Au centre de l’arc se trouve le bâtiment des gardes. C’est la seule porte de la saline, il permettait de contrôler les entrées et sorties pour prévenir les pillages. A l’intérieur et au centre : la maison du directeur pour asseoir l’autorité et permettre une meilleure surveillance des ouvriers.
De part et d’autre, on trouvait les bernes c’est-à-dire l’usine à proprement parler ; les berniers où logeaient les ouvriers qui étaient hébergés sur place ; la maréchalerie et les bâtiments administratifs. La saline était aussi dotée de lavoirs et d’un four à pain de sorte qu’une centaine de personnes pouvaient ainsi vivre dans l’enceinte de la manufacture en totale autarcie.
En 1895, victime de la révolution industrielle, la saline ferme ses portes. Le développement du chemin de fer permit en effet d’acheminer le sel en provenance des marais salants, moins coûteux à produire : la saline n’est plus compétitive.
La sauvegarde de la Saline
Après sa fermeture, la Saline n’est plus entretenue et les bâtiments se dégradent. En 1918, la foudre s’abat sur la Maison du Directeur et provoque un incendie qui détruira le toit.
Le tournant arrive en 1926 : un projet de classement aux monuments historiques est formulé ce qui n’est pas pour plaire à la société des Salines de l’Est, propriétaire des lieux. Pour échapper au classement et aux contraintes qui en résultent, ils dynamitent le péristyle de la Maison du Directeur et rasent de nombreux arbres. Ce geste insensé précipitera le rachat de la Saline par le département du Doubs en 1927. Une restauration sera effectuée dès 1930.
Pendant la Seconde Guerre, la Saline traversera des heures sombres. Des troupes allemandes y séjournent et un centre de rassemblement des tziganes y est installé par les autorités françaises entre 1941 et 1943. À la Libération elle servira de camp de prisonniers de guerre allemand.
Après la guerre, on prend conscience de l’intérêt patrimonial du site et en 1982, la Saline Royale est classée sur la liste du Patrimoine Mondial de l’Humanité par l’Unesco.
La Saline Royale de nos jours
Expositions permanentes et temporaires
Aujourd’hui, la Saline est un centre culturel dynamique. On y trouve une exposition permanente sur le sel mais aussi un très beau musée consacré à son génial architecte Claude-Nicolas Ledoux. De nombreuses maquettes permettent de découvrir plusieurs de ses créations aujourd’hui disparues – comme le Mur des Fermiers Généraux – ainsi que des projets qui n’ont jamais vu le jour mais qui montrent un esprit incroyablement moderne.
Plusieurs expositions temporaires sont également proposées ; actuellement et jusqu’au 5 janvier 2020 c’est Jules Verne qui est à l’honneur !
Festival des Jardins
Aller à la Saline c’est aussi se mettre au vert. Tout autour des bâtiments, les jardins accueillent chaque année le Festival des Jardins sur une thématique à chaque fois renouvelée. La 19e édition célèbre Woodstock avec le thème “Flower power”. Ces jardins sont élaborés en collaboration avec des écoles et offrent aux étudiants l’opportunité de concevoir ou réaliser un projet.
Au moment de ma visite, ces jardins étaient encore en cours d’élaboration mais promettent un résultat charmant et coloré pendant l’été !
Hôtel
Pour profiter pleinement de la Saline Royale, le mieux est encore d’y séjourner. Plusieurs bâtiments ont été reconvertis en un hôtel 3 étoiles. Les résidents de l’hôtel ont en plus le privilège de pouvoir se promener dans l’enceinte de la Saline toute la nuit, un peu comme à Fontevraud.
Aller visiter la Saline Royale d’Arc-et-Senans
Si vous avez envie d’aller découvrir la Saline Royale d’Arc-et-Senans, sachez qu’elle est accessible facilement depuis Paris. Il suffit de prendre le TGV jusqu’à Besançon puis un TER pour Arc-et-Senans, la gare est située à 200 mètres de la Saline. Comptez environ 3h30 pour y aller.
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Informations pratiques
Adresse :
Grande Rue
25610 Arc-et-Senan
Horaires :
Novembre à mars : 10h/12h ; 14h/17h
Avril, mai, juin, septembre et octobre : 9h/18h
Juillet et août : 9h/19h
Site internet :
http://www.salineroyale.com/
Tarifs :
Tarif plein : 10.50 €
16 à 25 ans : 7.00 €
6 à 15 ans : 5.50 €
Moins de 6 ans : gratuit
Des personnes ont réagi à cet article
Voir les commentaires Hide commentsJe rêve de visiter la Saline qui ne fascine depuis que Bluwal y a tourné des scènes de son mythique téléfilm Dom Juan avec Michel Piccoli et Pierre Brasseur en 1964
J’espère que vous pourrez y aller prochainement. C’est en effet un lieu fascinant et passionnant !
[…] rassemblement de VE (JET) avec l’association VEGA et FFAUVE nous avons découvert la Saline Royale. Louis XV demande son édification, confie le projet à l’architecte Claude-Nicolas Ledoux. En […]
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Nous avons visité la saline il y a quelques années, c\’est impressionnant, magnifique , elle procure beaucoup d\’émotions.
A voir ABSOLUMENT!
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