En 2016, le monde de l’art contemporain accueille une œuvre pour le moins insolite : America, une toilette fonctionnelle entièrement faite d’or 18 carats, conçue par l’artiste italien Maurizio Cattelan. Trois ans plus tard, l’oeuvre fut dérobée dans un palais anglais. Retour sur l’histoire du trône le plus cher du monde !
Un trône en or pour une satire mordante
America était une sculpture en forme de toilettes en or massif entièrement fonctionnelles. Composée de 103 kilos d’or, sa valeur en métal serait aujourd’hui d’environ 10 millions d’euros !
Proposée comme une pièce d’art participatif, elle fut installée dans une salle de bain du musée Guggenheim de New York, et les visiteurs pouvaient littéralement s’y asseoir et s’y soulager. Au-delà de l’étonnement et de la fascination, America portait un message acerbe, reflet des contradictions de notre époque.

L’or, le luxe, et l’absurde
Comme souvent avec Cattelan, l’œuvre joue sur les contrastes. Ici, un objet quotidien et trivial, symbole d’intimité et parfois de honte, est transformé en un artefact de richesse extrême. Ce n’est pas seulement une provocation esthétique : America incarne une critique cinglante du capitalisme, de l’ostentation et de l’illusion de grandeur. Le titre même de l’œuvre, évocateur d’un rêve américain déformé, suggère une satire de la culture de l’excès et de la consommation.
L’artiste a affirmé qu’il s’agissait « de l’art du 1% pour les 99 autres pour cent » – comprenez de l’art des personnes les plus riches de la planète pour toutes les autres !
Des toilettes proposées à Donald Trump
En septembre 2017, la Maison-Blanche demanda au musée Guggenheim de New York le prêt d’un tableau de Van Gogh pour les appartements privés de Donald Trump. Le musée refusa mais proposa de prêter America sans jamais obtenir une réponse de la Maison-Blanche !
Il faut dire que America pourrait aussi être une évocation de la carrière de Donald Trump, rappelant la dorure des projets immobiliers et des résidences privées du président des Etats-Unis. Sans infirmer cette signification, l’artiste ne l’a jamais confirmée, déclarant que le lien avec Trump « est un autre aspect, mais il ne devrait pas être le seul ».
Un vol rocambolesque digne d’un film
Mais América n’a pas seulement marqué par sa forme ou son message. En septembre 2019, alors qu’elle était installée dans les toilettes du palais de Blenheim, en Angleterre, l’œuvre a été volée. Les voleurs, bien organisés, ont arraché les toilettes en pleine nuit, causant d’importants dégâts aux canalisations historiques du bâtiment. L’acte, spectaculaire, a fait la une de nombreux médias à travers le monde. Cattelan, fidèle à son humour noir, déclara : « J’ai toujours aimé les films de braquage et enfin je suis dans l’un d’eux ».
Quelques mois plus tard, alors que Maurizio Cattelan fut suspecté un temps d’avoir lui-même organisé ce braquage, la compagnie d’assurance Generali s’associa à lui pour une campagne promotionnelle d’une assurance dédiée aux collectionneurs !

Depuis ce jour, América n’a jamais été retrouvée. Certains pensent qu’elle a été fondue pour revendre son or, d’autres imaginent qu’elle repose dans la collection secrète d’un amateur d’art aussi riche que déviant.
Un chef-d’œuvre d’ironie et de subversion
Maurizio Cattelan, connu pour ses œuvres provocantes comme le pape écrasé par une météorite (La Nona Ora) ou le fameux banane-scotchée (Comedian), signe avec América un manifeste brillant de dérision sociale. Elle interroge notre rapport à la valeur, à l’art, au pouvoir et à la décadence.

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