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Le Cri d’Edward Munch est une œuvre particulièrement célèbre, elle est même devenue un emoji ! Mais que nous dit vraiment ce tableau ? Pourquoi Munch a-t-il peint ce cri ? Découvrez les dessous de cette toile aux multiples sens cachés ! Analyse.

Edvard Munch : un artiste torturé

Portrait de Edvard Munch en 1933
Edvard Munch en 1933

Pour comprendre un peu mieux l’œuvre d’Edvard Munch (1863-1944), il faut se pencher sur son enfance. Très tôt, Munch est confronté à la mort : à seulement 5 ans, sa mère décède de la tuberculose puis il perd l’une de ses sœurs de cette même maladie alors qu’il n’a que 13 ans. Peu après, une autre de ses sœurs souffre de dépression grave et sera internée à vie tandis que son frère meurt subitement d’une pneumonie quelques mois seulement après son mariage.

Forcément traumatisé par ces drames successifs, Munch est souvent touché par la dépression ce qui transparaît souvent dans son travail. Ses œuvres abordent souvent les thèmes de l’angoisse, la mélancolie, la peur, la mort et la douleur. Par la peinture il souhaite exprimer, selon ses propres termes, “les états d’âme les plus subtils”.

Edvard Munch, L'enfant malade
Edvard Munch, L’enfant malade, 1885, 119,5 x 118,5 cm

Quel est ce Cri ?

Il n’existe pas une version du “Cri” mais cinq : trois peintures, un pastel et une lithographie créés entre 1893 et 1917. Le Cri fait partie d’une série de tableaux intitulée la “Frise de la Vie”.

Mais alors, que représente ce tableau ? Un extrait du journal intime d’Edvard Munch nous permet d’en apprendre davantage. Le 22 janvier 1892, il écrit ces quelques lignes :

« Je me promenais sur un sentier avec deux amis — le soleil se couchait — tout d’un coup le ciel devint rouge sang. Je m’arrêtai, fatigué, et m’appuyai sur une clôture — il y avait du sang et des langues de feu au-dessus du fjord bleu-noir de la ville — mes amis continuèrent, et j’y restai, tremblant d’anxiété — je sentais un cri infini qui passait à travers l’univers et qui déchirait la nature ».

Eh oui ! Contrairement à l’idée reçue, le cri ne vient pas du personnage mais de la nature. Le personnage apparaît effrayé et se couvre les oreilles pour estomper un cri assourdissant. 

Le Cri de Edvard Munch, 1893
Edvard Munch, Le cri, 1893, Galerie Nationale d’Oslo

Une éruption volcanique à l’origine du Cri ?

Alors d’où vient ce “cri infini qui déchirait la nature” ? Selon quelques scientifiques, cela pourrait être lié à un phénomène naturel. En 1883 le Krakatoa, un volcan indonésien, entre dans une violente éruption et provoque un bruit assourdissant, le plus fort entendu sur Terre. Les secousses sismiques auraient parcouru sept fois le globe avec un bruit si puissant qu’il aurait été entendu à 4 800 km à la ronde.

L’éruption aurait par ailleurs rejeté dans l’atmosphère des millions de particules de cendres volcaniques s’éparpillant notamment jusqu’en Norvège.

Ce phénomène pourrait ainsi expliquer ce que l’artiste décrit dans son journal, le ciel rouge sang et le “cri infini qui passait à travers l’univers”.

Lithographie de l'éruption du Krakatoa en 1883
Lithographie de 1888 représentant l’éruption du Krakatoa en 1883

Une autre théorie est davantage liée à la personnalité torturée de l’artiste. Munch vivait à côté de l’hôpital psychiatrique où sa sœur était internée. Le cri pourrait être la représentation de son anxiété et de ses angoisses.

Un visage terrifié et terrifiant

En 1892, soit un an avant de peindre “Le Cri”, Munch peint le tableau “Désespoir”. Les deux toiles se ressemblent énormément : couleurs, format, proportions… tout est identique à l’exception du personnage principal.

Edvard Munch, désespoir
Edvard Munch, Sick Mood at Sunset, Despair (Désespoir), 1892, 92 x 67 cm

Dans Le Cri, l’homme au manteau et au chapeau est remplacé par cette figure mystérieuse au visage émacié que l’on peine à décrire : est-ce un homme ou une femme ? une personne vivante ou morte ? est-il vêtu d’une robe ou d’un manteau ?… Alors d’où vient ce visage saisi d’horreur ?

Robert Rosenblum, un historien de l’art, a émis l’hypothèse que ce visage pourrait être inspiré d’une momie du peuple péruvien Chachapoya. En effet, en 1889 Edvard Munch étudie à Paris après avoir obtenu une bourse. Il se pourrait qu’il ait vu cette momie qui était exposée au musée d’ethnographie du Trocadéro et il est vrai que les ressemblances sont assez frappantes.

Le Cri d'Edvard Munch : analyse d'un chef d'œuvre 6
Momie péruvienne, Vallée de l’Utcubamba ©MNHN – J.C. Domenech

Qui sont les deux personnages au loin ?

Si vous regardez attentivement cette œuvre, deux personnages semblent s’éloigner vers la gauche. Il s’agit de d’amis de l’artiste, ainsi qu’il le décrit dans son journal : « Je me promenais sur un sentier avec deux amis (…) mes amis continuèrent, et j’y restai, tremblant d’anxiété« .

Cette phrase nous explique aussi que cette œuvre est autobiographique et que le personnage qui se couvre les oreilles, terrifié, est bien l’artiste lui-même.

La réception de l’œuvre

C’est en 1895 que Le Cri est présenté pour la première fois au public à la galerie Blomqvist d’Oslo. A l’époque, les critiques sont nombreuses et beaucoup mettent en doute la santé mentale d’Edvard Munch à tel point qu’un étudiant en médecine va jusqu’à le traiter de fou.

Sur le tableau conservé au Nasjonalmuseet de Norvège, une inscription énigmatique présente dans le coin supérieur gauche indique en norvégien : “Ne peut avoir été peint que par un fou”. Pendant longtemps on s’est demandé qui avait déposé cette inscription. Finalement, des analyses récentes ont révélé que c’était Munch lui-même qui aurait apposé cette phrase, en pied de nez à ses détracteurs.

Inscription cachée dans le tableau Le Cri d'Edvard Munch
Imagerie infrarouge du tableau qui révèle la phrase « Kan kun være malet af en gal Mand! » (« Ne peut avoir été peint que par un fou ! ») ©Nasjonalmuseet/Børre Høstland

Aujourd’hui, Le Cri est considérée comme une œuvre majeure. Par ses couleurs vibrantes et peu réalistes, elle montre une nouvelle façon de créer de l’art. C’est un tournant entre le mouvement symboliste et le mouvement expressionniste.

En 2012, l’une des versions du Cri a été vendue aux enchères chez Sotheby’s New York pour la somme de 119,92 millions de dollars !

Autoportrait de Edvard Munch
Edvard Munch, autoportrait (détail), 1895

Un cri entré dans la culture populaire

Désormais, Le Cri est l’un des chefs-d’œuvre les plus connus au monde. Il a fait l’objet de multiples parodies à commencer par l’emoji présent dans tous nos téléphones en passant par de très très nombreuses reprises…

LIRE AUSSI : American Gothic de Grant Wood, les sens cachés d’un chef-d’œuvre

Où est exposé Le Cri d’Edvard Munch ?

Comme expliqué plus haut, il existe cinq versions du Cri. La plus célèbre est celle de 1893 exposée à la Galerie Nationale (Nasjonalgalleriet) d’Oslo.

Deux autres versions (un pastel sur carton de 1893 et une tempera sur carton de 1910) sont présentées au Musée Munch (Munchmuseet) également à Oslo. Un pastel sur Carton de 1895 est en collection privée.

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Comments to: Le Cri d’Edvard Munch : analyse d’un chef d’œuvre
  • 22 avril 2021

    Passionnant merci bcp

    Reply
  • 24 avril 2021

    l\’incroyable découverte de la vie et l\’ Oeuvre de ce peintre
    je n\’avais rien compris
    un article fantastique
    Merci

    Reply
  • 9 mai 2022

    il existe aussi un cri de Rodin de 1893 les 2 se sont inspirés l\’un l\’autre ?

    Reply
  • 21 octobre 2022

    I have always truly loved this work of art : it totally reflects my double personality (I am bipolar) and the incredible horror I too often feel at being nothing, my brain being split between terror and exaltation.
    I however have a wonderful family and feel deeply loved.
    Nevertheless, the covid has quite isolated me from my friends and I feel left out : pretty hard …
    Munch is a wonderful artist, and all his art is worth seeing !

    Reply
  • 3 juin 2023

    Merci beaucoup sa ma beaucoup aidé pour mon oral du brevet vous étent les boss

    Reply
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