A l’occasion de l’exposition Sur la route des chefferies du Cameroun présentée jusqu’au 17 juillet 2022, le musée du quai Branly-Jacques Chirac donne carte blanche à l’auteur-compositeur et écrivain camerounais Blick Bassy pour l’élaboration d’une série de propositions artistiques. Des concerts, conférences et spectacles qui auront lieu au musée du 12 mai au 18 juin.
Dans cette interview, Blick Bassy nous en dit plus sur cette programmation…
Interview réalisée en collaboration avec le musée du Quai Branly – Jacques Chirac
Le musée du quai Branly-Jacques Chirac vous donne carte blanche pour une série de propositions artistiques autour de l’exposition Sur la route des chefferies du Cameroun. Qu’allez-vous proposer ?
Je me sens honoré pour cette carte blanche. J’ai fait six propositions diverses:
- Un spectacle autour d’un conte-dansé (Bikutsi 3000) qui raconte l’histoire d’une Afrique revisitée, dirigée par des reines qui lancent une résistance aux colons et à toute forme d’impérialisme grâce à 5 armées de danseuses dirigées par 5 capitaines expérimentées qui ont pour mission la reconnexion des populations avec leurs traditions, leur histoire et leur environnement ;
- Une interview des instruments, pièce de théâtre avec Emil Abossolo ;
- Une programmation autour de la scène afro féminine actuelle avec Kareyce Fotso, Ami Yerewolo, Poundo (Nouvelle vague féminine afro-contemporaine) ;
- J’ai également écrit et réalisé un court métrage autour des berceuses d’hier, d’aujourd’hui et de demain au Cameroun (Future Lullaby), qui sera diffusé dans la Boîte à Musique sur le plateau des Collections permanentes, jusqu’en septembre ;
- Il y aura également un échange musical entre la philosophe Yala Kisukidi et moi (conférence musicale) ;
- Puis un concert de « 1958 », mon dernier album sorti chez No Format/Tôt ou Tard en 2019.
Au cours de cette carte blanche, vous déployez une palette de talents : des contes, une berceuse, un hommage à l’histoire de votre pays… D’où vous vient cette curiosité ?
J’ai toujours pensé que nous sommes tous des « slashers » comme on dit aujourd’hui, et que nous avons la capacité de nous diversifier. L’exploration de divers arts me permet aussi de me réinventer et me nourrit, renforce ma créativité en me plongeant dans des façons de créer qui varient d’un art à un autre. Le super actif que je suis prend beaucoup de plaisir à exercer plusieurs arts !
Ce sont [les instruments] qui ont manifesté leur envie de parler et je n’ai fait que suivre leurs signaux.
Vous allez notamment sortir des réserves du musée une sélection d’instruments dont l’histoire sera présentée par le conteur Emil Abossolo Mbo. Comment avez-vous choisi ces instruments ?
Mon envie était de trouver trois instruments en capacité de parler, de nous raconter leur histoire, trois instruments différents du fait de leur musicalité également. Nous voulions les sampler afin d’en faire une petite chanson. Parmi une trentaine d’instruments présentés, ces trois instruments ont fait appel à moi. Ce sont eux qui ont manifesté leur envie de parler et je n’ai fait que suivre leurs signaux lors de la sélection.
Dans la culture camerounaise, le Bikutsi est une musique destinée à soulager la souffrance. Pensez-vous que la musique peut aider à guérir de certains maux ?
La musique et la danse soignent tous les maux. C’est ce que j’essaie d’une certaine façon de démontrer avec ce conte-dansé. J’ai eu la chance de grandir dans un environnement où la musique et la danse rythment le quotidien des populations de manière naturelle. Lorsqu’on porte un regard avisé sur le rôle et l’utilisation à bon escient de ces deux médias dans le fonctionnement de la cité, alors on se rend compte qu’ils font partie des éléments essentiels participant à l’émancipation d’une communauté.
Si j’invite à un retour d’urgence aux traditions, c’est dans le but de mieux appréhender la modernité.
L’exposition nous montre que les traditions ont beaucoup d’importance au Cameroun. De quelle manière ces traditions influencent-elles votre musique ?
Ces traditions sont au centre de tout ce que je fais. C’est l’une des raisons pour laquelle je chante exclusivement en langue bassa. Ceci dit, si j’invite à un retour d’urgence aux traditions, c’est dans le but de mieux appréhender la modernité. J’aime à dire que le meilleur chemin de l’afro futurisme c’est le retour aux traditions car sans base solide, il n’y a pas de futur.
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Parmi vos créations pour le musée du quai Branly-Jacques Chirac, quelle est celle qui vous touche le plus ? Pourquoi ?
C’est certainement Bikutsi 3000, le spectacle conte-dansé qui était un challenge dans la création, mais aussi et surtout par la force de ce que porte son récit.
Quelle musique camerounaise aimeriez-vous faire découvrir aux lecteurs de Culturez-vous ?
Le Cameroun est encore appelé l’Afrique en miniature de par sa diversité culturelle et géographique, pays composé de plus de 270 ethnies qui comporte chacune des danses et musiques différentes. J’aimerais faire découvrir les Têtes Brûlées, Messi Martin, Jean Bikoko Aladin, Eboa Lotin.
Un grand merci à Blick Bassy pour cette interview ! Pour aller + loin :
- Retrouvez l’actualité de Blick Bassy blickbassy.com
- Découvrez l’exposition Sur la route des chefferies du Cameroun jusqu’au 17 juillet au musée du quai Branly-Jacques Chirac quaibranly.fr
- Consultez la programmation de la Carte Blanche de Blick Bassy au musée du quai Branly-Jacques Chirac quaibranly.fr
Interview réalisée dans le cadre d’un partenariat avec le musée du quai Branly-Jacques Chirac
Photo d’en-tête : portrait de Blick Bassy © kgomotso neto
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