Polis par les ans,
Décoreraient notre chambre.
« L’Invitation au voyage », Les Fleurs du Mal, Charles Baudelaire
C’est un véritable parcours à travers le XVIIIe siècle que nous propose le Musée des Arts décoratifs, en utilisant les évolutions d’une technique fascinante comme fil conducteur. Tout l’intérêt réside dans l’adaptation par les artisans français des techniques venues d’Extrême-Orient au cours du siècle. L’itinéraire chronologique choisi par les commissaires est en cela très efficace.
Le terme qui désigne la technique de substitution est révélatrice de son caractère typiquement français : le « vernis Martin », encore aujourd’hui premier patronyme porté dans le pays. Les frères Martin parviennent en effet à obtenir un effet comparable à la laque en utilisant la résine d’essences différentes de celles du Japon ou de la Chine. Cette expression circulait déjà au XVIIIe siècle : « En France, on a pas de Toxicodendron vernicifluum, mais on a des idées ».
On en a tellement, des idées, qu’assez rapidement la couleur apparaît dans les créations françaises. Les motifs se diversifient pour mener à une réelle émancipation dans le seconde moitié du siècle. Plus encore, les vernis envahissent tout l’ameublement. L’exposition parvient avec précision à montrer la diversité des objets pouvant supporter un tel traitement, depuis les innombrables boîtes et étuis jusqu’aux meubles, en passant par les instruments de musique. La fascination atteint son comble lorsqu’on arrive devant les instruments scientifiques, d’une facture nécessairement délicate et précise, qui accueillent eux aussi des éléments de laque.
Se promener à travers cette exposition, c’est aussi fréquenter le temps d’un instant les grandes familles du royaume, entrer dans leur intimité comme dans leur désir d’ostentation. L’exposition s’ouvre en effet sur des objets venus d’Extrême-Orient ayant appartenu aux Condé, se poursuit par des panneaux venant de l’hôtel du duc de Richelieu, une délicieuse commode de Madame Adélaïde (quatrième fille de Louis XV), sans compter la berline de la Maison du Roi du Portugal qui trône en majesté au milieu de la nef.
Il est à noter qu’un parcours « vernis Martin » a été installé au Musée Nissim de Camondo, les dispositions testamentaires régissant les œuvres n’en permettant pas le déplacement.
Informations pratiques :
Les Arts Décoratifs – Nef
107 rue de Rivoli
du mardi au dimanche de 11h à 18h (nocturne le jeudi)
Entrée : 8€/9,50€
Jusqu’au 8 juin 2014
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