Le musée national des arts asiatiques – Guimet, situé à Paris, est une référence incontournable pour les passionnés d’art asiatique. Son histoire trouve une origine surprenante : la couleur bleue.
Son fondateur, Émile Guimet, était le fils d’un industriel lyonnais spécialisé dans la production de pigments, en particulier le bleu outremer artificiel. Ce commerce florissant lui permit de financer ses voyages en Asie et de collectionner des œuvres qui ont donné naissance à l’actuel musée.
La révolution du « bleu Guimet »
Jusqu’au début du 19e siècle, les peintres font face à un problème : le bleu outremer coûte extrêmement cher. Ce pigment obtenu par broyage du lapis-lazuli vaut à l’époque encore plus cher que l’or !
Pour trouver une alternative à ce bleu si coûteux, la Société d’encouragement pour l’industrie nationale lance en 1824 un concours doté d’un prix de 6000 francs – une somme très importante pour l’époque – pour récompenser celui qui trouvera la recette d’un bleu outremer artificiel bon marché.
Les années passent sans que personne ne trouve la recette miracle, jusqu’à ce que Jean-Baptiste Guimet (1795-1871) se penche sur la question. Il n’est pas un grand passionné de couleurs mais est fou amoureux d’une peintre, Rosalie Bidauld. Par tendresse pour celle qu’il vient d’épouser, il commence à se pencher sur ce problème de bleu.
« Charge-toi de peindre, moi je me chargerai des couleurs, tu n’en manqueras jamais. »
En 1826, Jean-Baptiste Guimet trouve la formule magique mais il prend le temps de la perfectionner et de la faire tester par quelques peintres comme Jean-Auguste-Dominique Ingres. C’est seulement en 1828 qu’il officialise sa découverte, remporte le prix et commercialise son « Bleu Guimet ».
La fortune du bleu outremer artificiel
L’invention de son procédé chimique permettant de recréer un bleu intense à moindre coût ouvrit de nouvelles perspectives dans l’industrie artistique mais aussi textile car pour rentabiliser sa découverte, Jean-Baptiste Guimet trouve d’autres débouchés à son bleu, notamment l’azurage de papiers et tissus, un procédé qui permet de parfaire l’effet de blancheur en ajoutant une légère coloration bleutée.
Cette découverte fit ainsi la fortune de la famille Guimet.
La naissance du musée Guimet
Le lien entre le bleu Guimet et le musée éponyme arrive quelques années plus tard… En 1836, le couple Guimet donne naissance au petit Emile. Armé de la fortune familiale et du goût pour l’art que lui a transmis sa mère, Emile Guimet (1836-1918) part à la découverte du monde. Grand voyageur, il profite de ses escapades pour collectionner des objets d’art extra-européens.
Désireux de partager ses découvertes avec le public français, il fonde un premier musée à Lyon en 1879 avant de faire don de ses collections à l’Etat en 1884 et d’ouvrir le musée Guimet de Paris en 1889.
Un hommage chromatique
Le musée Guimet doit donc son existence à une couleur : le bleu. Cette teinte, si précieuse dans l’histoire de l’art, a indirectement permis la constitution d’une collection exceptionnelle. Aujourd’hui encore, le bleu résonne dans les salles du musée, rappelant l’incroyable destin de son fondateur car ironiquement, le musée Guimet abrite aujourd’hui une impressionnante collection de céramiques et peintures où le bleu occupe une place de choix. Des porcelaines chinoises ornées de motifs bleus aux œuvres japonaises utilisant le pigment indigo, la couleur qui permit la création du musée se retrouve dans nombre de ses trésors.
Ainsi, sans le bleu outremer artificiel, Émile Guimet n’aurait probablement jamais eu les moyens de constituer sa collection, et Paris n’aurait pas hérité de l’un de ses plus beaux musées d’art asiatique.
Si vous souhaitez découvrir par vous-même ces œuvres fascinantes, une visite au musée Guimet s’impose. Un voyage chromatique et culturel inoubliable vous y attend.
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