Avant d’être la fière propriétaire d’un magasin de donuts, Edna Howards a connu la violence des hommes. Celle de son père, d’abord, artisan prospère de Californie qui n’hésite pas à rendre visite à sa fille, les nuits de solitude, dans l’ignorance feinte du reste de la famille. Celle de son mari, ensuite, dans les bras duquel elle se jette, très jeune, pour échapper à l’emprise paternelle. Avec lui, Edna aura deux fils, qu’elle se promet de protéger coûte que coûte.
Le bruit commence à courir : il y a, en ville, une femme dont la porte est toujours ouverte et qui vient en aide à ceux dont elle ne connait que trop bien l’histoire. L’énergie qu’elle déploie à ré-enchanter leur quotidien a la force de l’apaisement. Auprès d’eux, elle trouve le courage de briser le schéma de reproduction des comportements violents, mais surtout de pardonner. De renouer avec ce père qu’elle n’a jamais cessé d’aimer.
L’histoire d’Edna est une histoire vraie. Cette modeste grande femme qui a aujourd’hui 75 ans n’est autre que la tante de Jordan Beswick, auteur et metteur en scène de la pièce. Pour incarner une joie de vivre que la détresse n’a pas su consumer, il choisit le sourire de Natasha Mashkevich.
« L’humour noir est la politesse du désespoir », disait Achille Chavée. Si Edna n’est pas dépourvue d’humour, le sien n’est teinté ni de rancune, ni d’affliction. Elle ne dénonce pas les bourreaux, ne joue pas sur le sempiternel ressort de la culpabilisation des « autres », ceux qui restent passifs face à la souffrance d’autrui, ne tombe jamais dans le travers de l’opposition entre homme (dominateur) et femme (victime de l’atavisme patriarcal) – Les contes ne sont pas nés avec une morale.
A l’heure où le féminisme se cherche une identité, la présence de Notre-Dame de Perpétuels Donuts au festival « Toi, Femme » le 9 octobre agit comme une bouffée d’air frais – malheureusement passée inaperçue.
Spectateur curieux ? Théâtre convaincu ? La bande-annonce de la pièce ici :
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