Le cognac est un produit très complexe qui demande du temps et un grand savoir-faire. Ce digestif parfois consommé en cocktail, produit exclusivement en Charente, est pourtant assez méconnu des français. Alors quelle est l’histoire du cognac ? comment le fabrique-t-on ? et comment le choisir ?
Pour découvrir ses secrets de fabrication, je suis allé à la rencontre des équipes de la maison Martell, à la fois dans les Borderies au cœur des vignes de la célèbre marque, ainsi que dans leur espace de dégustation.
Sommaire
Le cognac : une longue histoire
Le cognac est peu consommé des français mais les étrangers en raffolent : 98 % de la production s’exporte ! Cette particularité vient certes d’une différence culturelle mais aussi de l’histoire même du cognac.
Au XVIIIe siècle, les Anglais et Hollandais importaient beaucoup de vin charentais mais celui-ci, parfois de mauvaise qualité, supportait mal le voyage et arrivait avec un mauvais goût. Pour mieux le conserver les Hollandais ont eu l’idée de le distiller, une pratique qui avait deux avantages : d’une part le produit se conservait mieux, d’autre part il se trouvait plus concentré ce qui permettait de payer moins de taxes. Ce n’est qu’une fois arrivé en Hollande qu’on le diluait dans l’eau. Ce faisant, on s’est rendu compte que le vin distillé se bonifiait pendant le transport dans les barriques en bois… les bases de la fabrication du cognac étaient posées même si son élaboration est un peu plus complexe comme vous allez le voir.
Comment s’élabore le cognac ?
L’élaboration du cognac va plus loin qu’une simple distillation. C’est un procédé lent et complexe qui réclame un grand savoir-faire et beaucoup de technicité. Tout part du raisin cultivé, bien sûr, dans les environs de Cognac. Dès les vendanges, celui-ci est pressé et la fermentation est lancée : le sucre se transforme en alcool et permet d’obtenir du vin. Une double distillation est ensuite appliquée dont il ressort une liqueur très pure et aromatique qui titre à 70 degrés.
Cette liqueur est stockée dans des fûts de bois français, lançant le long voyage du vieillissement qui durera plusieurs années. Pendant le vieillissement, il y a un échange naturel entre l’eau-de-vie et le bois qui va venir colorer le précieux liquide et l’enrichir de nouveaux arômes. Au cours de cette étape environ 2 % de l’alcool s’évapore, on l’appelle poétiquement « la part des anges ». Cette évaporation fait le bonheur du torula, un champignon qui se nourrit de vapeurs d’alcool et qui vient teinter les murs des chais d’une couleur noire typique du territoire.
Le Maître de chai et le Maître assembleur : chefs d’orchestre du cognac
Les eaux-de-vie vieillies ne sont pas pour autant du cognac. Ce sont des assemblages de plusieurs de ces eaux-de-vie qui donneront naissance au fameux alcool. C’est là qu’interviennent le Maître de chai et Maître d’assemblage qui sont au cognac ce que les « nez » sont au parfum : leur expertise permet de faire naître les meilleurs dosages pour créer les assemblages les plus savoureux. Chaque jour, ils dégustent entre 40 et 70 eaux-de-vie différentes pour en orchestrer le vieillissement en les faisant parfois vieillir dans des fûts déjà utilisés pour leur donner une nouvelle saveur, en réalisant des pré-assemblages ou encore en stoppant leur vieillissement en les stockant dans des dames-jeannes, de grandes bonbonnes de verres de plusieurs dizaines de litres.
Cette méthode de fabrication explique qu’il y a rarement des millésimes pour le cognac : puisqu’ils sont créés à partir d’eaux-de-vie d’années différentes, on ne peut pas les attribuer à une année précise. On retiendra plutôt l’année de mise en bouteille qui fige l’évolution du produit.
On comprend aussi mieux la diversité des cognacs que l’on trouve sur le marché. Si certains se trouvent autour de quelques dizaines d’euros, d’autres flacons en valent plusieurs milliers. Les premiers sont créés à partir d’eaux-de-vie jeunes là où les seconds peuvent être constitués de plusieurs centaines d’assemblages d’eaux-de-vie ayant vieilli parfois plus de cent ans !
Pour faciliter leur reconnaissance, les différents cognacs sont classés en plusieurs appellations :
- Le VS (Very Special) : constitué d’eaux-de-vie de deux ans minimum
- Le VSOP (Very Superior Old Pale) : constitué d’eaux-de-vie de quatre ans minimum
- Le XO (Extra Old) : constitué d’eaux-de-vie de six ans minimum, dix ans s’il a été produit après 2018.
- Le XXO : constitué d’eaux-de-vie de quatorze ans minimum
Comment choisir un cognac ?
Entre toutes les maisons et toutes les variétés de cognac il est parfois difficile de s’y retrouver. Le choix d’un cognac dépendra de votre palais et de l’utilisation que vous souhaitez en faire. Utilisé en cuisine ou en cocktails, de jeunes cognacs (type VS ou VSOP) seront suffisants. Pour une dégustation en digestif on préférera un XO.
Gardez aussi à l’esprit que contrairement au vin, le cognac ne vieillit plus une fois en bouteille. Il conserve donc toute sa vie l’âge qu’il avait au moment où il a été mis sous verre.
Les bouteilles mentionnent parfois une dénomination géographique supplémentaire indiquant la zone précise de la provenance de l’assemblage (Grande Champagne, Fine Champagne…). Ceci permet d’avoir une idée du sol dans lequel le raisin a été formé :
- La Grande et Petite Champagne sont le cœur du vignoble. Ils produisent des eaux-de-vie fines à la saveur florale,
- Les Borderies est un terroir à proximité de la ville de Cognac, au parfum de violette et d’iris,
- Les Fins Bois, sont situés sur une zone plus éloignée généralement utilisé pour des cognacs au vieillissement court,
- Les Bons Bois sont des vignes de régions forestières ou qui côtoient des cultures agricoles,
- Les Bois Ordinaires ont des sols sableux, plus proches de l’océan.
L’idéal est bien sûr de pouvoir goûter différents cognacs pour éduquer votre palais et trouver le produit qui correspond le plus à votre goût. A défaut, les cognacs de grandes maisons comme Martell qui m’a accueilli mais aussi Hennessy ou encore Remy Martin, utilisent de nombreux assemblages pour conserver au fil des années des produits qui conservent un goût stable et sont généralement des valeurs sûres. Ainsi, le cognac XO Cordon Bleu de chez Martell n’a pas changé de recette depuis 1912.
Visiter la maison Martell
En allant dans la ville de Cognac, vous tomberez forcément sur de nombreux producteurs, beaucoup proposent des visites. Ces dernières permettent de découvrir les méthodes de production et souvent de déguster différentes variétés de cognac.
Pour ma part, je suis allé visiter la maison Martell, la plus ancienne des maisons de cognac, créée en 1715 par l’anglais Jean Martell. La visite Martell The Journey se fait dans les anciens chais et peut se faire en une demi-heure comme en une demi-journée selon le temps que l’on souhaite y consacrer.
On y découvre l’héritage de la Maison, son savoir-faire et “la part des anges”, une partie qui explore les techniques d’élaboration du cognac. Une expérience qui se termine par une dégustation vous permettra de tester les différents produits de la maison, des plus classiques aux plus originaux comme le “Blue swift”, un dérivé du cognac dont le vieillissement a été achevé en fûts de bourbon du Kentucky ce qui le prive de l’appellation cognac mais qui lui donne une structure puissante idéale pour les cocktails. Vous pourrez aussi procéder à votre propre assemblage et mettre en bouteille votre montre de cognac (une petite bouteille de 20 cl).
Non ouvert à la visite, voici l’espace de dégustation du Maître de Chais, du Maître assembleur et de leur équipe. C’est ici, dans cet ancien chai, qu’ils dégustent et documentent chaque jour les eaux-de-vie pour élaborer les différents cognacs de la gamme Martell.
Pour compléter votre visite, ne manquez pas d’aller faire un tour à la Fondation d’entreprise Martell, une institution culturelle dédiée à la création contemporaine qui présente actuellement une passionnante exposition de design.
EN SAVOIR + : La Fondation Martell, la nouvelle place(s) to be à Cognac !
Et, bien sûr, on rappelle que l’abus d’alcool est dangereux pour la santé et que votre consommation de cognac, comme tous les autres alcools, est à faire avec modération !
Un immense merci à Christian Guérin, Maître assembleur chez Martell ainsi qu’à Margot Delpeuch et Alexandre Combescot de Marsaguet, Brand Education Ambassadors pour leur accueil, leur temps et leurs explications.
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Voir les commentaires Hide commentsBon article ! C\’est très bien résumé. Bravo pour avoir fait figurer le XXO et avoir bien mentionné le changement de compte d\’âge pour le XO ! A votre disposition si vous revenez visiter la région !
Merci Marie !