Dans ce roman paru en 1970, Monsieur Jadis est un vieux monsieur qui évoque ses souvenirs de jeunesse à Paris, souvent liés à une vie noctambule très active. Si le livre d’Antoine Blondin n’a pas laissé un grand souvenir à ma mémoire de lecteur, ce court extrait en revanche l’a marquée d’une façon indélébile.
« Quand nous serons bien vieux et bien milliardaires, dit Roger Nimier, nous réveillonnerons sur un banc, au pied de nos hôtels particuliers de l’avenue Foch, d’une gamelle de nouilles arrosées d’un Dom Pérignon qui aille avec. Nos mères, qui sont immortelles, viendront nous faire de la musique dans le froid ; la tienne jouera de l’accordéon, la mienne du violon. Et il n’est pas impossible que nous soyons heureux. »
J’aime d’amour ces quelques lignes aux allures surréalistes où deux messieurs s’inventent une vie riche et fastueuse mais qui, au fond, ne rêvent que de plaisirs simples. Pour aller avec un Dom Pérignon ? Des nouilles, servies dans une gamelle ! En guise de fauteuil ? Un banc fera l’affaire ! Et pour la musique ? Qu’importe du moment que leurs mères soient présentes.
Nous nous sommes tous laissés aller à la douce rêverie d’une vie de gagnant du LOTO, nous imaginant vivre dans des hôtels particuliers, passer la moitié de l’année sur des îles paradisiaques, conduire des voitures de luxe ou porter de la haute couture. Et pourtant, ce court texte nous rappelle que le bonheur ne réside pas dans le bling bling ostentatoire mais bien dans les petits plaisirs simples de la vie : un modeste banc pour se reposer, un bon ami pour refaire le monde, une famille et un plat de pâtes pour se remplir l’estomac.
Alors qu’importe le LOTO et les comptes en banque bien garnis ! Le bonheur est à portée de main et il n’est pas impossible que nous soyons déjà heureux. Il suffit juste d’ouvrir les yeux sur ce qui fait vraiment notre bonheur.
Antoine Blondin, Monsieur Jadis ou l’école du soir
1970, éditions Folio, 220 pages
ISBN : 978-2070360291
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