Chanteur lyrique… voilà bien un métier peu commun ! C’est celui de Julie Fuchs, chanteuse Soprano qui a accepté de répondre à nos questions entre deux Opéras. Comment devient-on chanteur lyrique, quel travail ce métier demande-t-il y au quotidien… ? Julie nous fait découvrir les coulisses d’un univers peu banal mais assurément passionnant !
Pourriez-vous vous présenter et nous parler de votre parcours ? Comment devient-on chanteuse lyrique ?
Je suis artiste lyrique, ou soprano. J’ai découvert la musique classique quand mes parents nous ont inscrits mon frère, ma sœur et moi au conservatoire d’Avignon, ville où nous habitions. Un coup de folie j’ai l’impression car personne dans ma famille ne pratiquait la musique. J’ai donc commencé l’apprentissage du violon à 7 ans, avec tout ce qui va avec : formation musicale, solfège, orchestre, chœur, musique de chambre… Assez vite j’ai aimé chanter et me suis donc d’abord beaucoup amusée dans des groupes de variété, de jazz, un chœur européen a capella (avec qui nous avons accompagné Bjork), un quintette vocal a capella avec qui nous chantions dans les rues d’Avignon lors du Festival…
Parallèlement j’ai aussi commencé à suivre un cursus théâtral. A 18 ans je me suis décidée à prendre mon 1er cours de chant. J’ai eu la chance de rencontrer un professeur qui m’a vraiment donné confiance et 3 ans après j’étais reçue au Conservatoire National Supérieur de musique et de danse de Paris. Mes études au sein du conservatoire de Paris m’ont amenée à obtenir un Master 2 d’Interprète à l’Unanimité avec les félicitations du Jury. Ça c’est ce qui fait bien sur le CV mais la réelle richesse de cette ultime période d’études a été la rencontre et le travail ultra enrichissants avec des professeurs-artistes et des camarades qui sont aujourd’hui mes partenaires de jeu.
Chanter vous demande-t-il un entrainement régulier ?
Oui ! Nous sommes des artistes-sportifs. Pour ma part j’aime me sentir disponible corporellement. Je pratique donc au moins 2 fois par semaine le yoga en plus de mes sessions personnelles de 45 minutes avant une représentation ou une répétition importante. L’hygiène de vie est importante aussi: un bon sommeil, un système immunitaire fort, une bonne hydratation.
Pour ce qui est de l’entraînement vocal cela dépend des périodes. En périodes de répétitions, nous chantons déjà beaucoup donc je vais plutôt privilégier un bon échauffement avant le début des répétitions. Pareil pour les jours de représentations. Quand j’ai d’avantage de temps libre, je programme des séances de coaching afin de travailler plus en profondeurs mes prochains rôles.
Tous les ans je me réserve aussi une semaine de retraite intensive de remise à plat de mon instrument et de préparation aux plus gros défis à venir. C’est devenu un de mes moments préférés de ma vie de chanteuse. Et puis quand je décide que ce sont les vacances, je ne fais plus rien, j’oublie tout, je bois des cocktails au soleil et danse toute la nuit sur de la techno.
Comment se passe la préparation d’un Opéra ? Combien de temps avant le spectacle travaillez-vous dessus ?
La préparation d’un Opéra est d’abord assez solitaire. Je commence toujours par lire le livret, le traduire s’il n’est pas en français, et lire des ouvrages littéraires qui y sont liés. Ce travail peut se faire 1 an à l’avance. Puis je lis tranquillement la partition sans rien en attendre, juste en la laissant me traverser. Et enfin je vais travailler plus en profondeur les passages techniques délicats avec ma professeur de chant et avec des pianistes appelés chefs de chant, qui sont un peu les anges gardiens des chanteurs. Je vais aussi me concentrer sur l’apprentissage du par cœur. En général je suis en mesure de faire tout ce travail plus fouillé le mois qui précède la première répétition officielle.
Cette première répétition, c’est un peu la rentrée des classes : on rencontre nos collègues, l’équipe artistique et musicale. On découvre les décors, les costumes et parfois les lieux de répétitions et de représentations quand on ne les connait pas encore. Pour une nouvelle production, cette première répétition se situe un bon mois avant la première représentation. Quand c’est une « reprise », c’est-à-dire un spectacle qui a déjà été crée auparavant, cette « rentrée des classes » peut se faire 3 jours avant la Première. Je vous laisse imaginer les nerfs solides qu’il faut avoir…
Quel est le plus beau lieu dans lequel vous avez pu chanter ? Et celui dans lequel vous rêveriez de vous produire ?
Nous avons de la chance, à l’Opéra, nous côtoyons la plupart du temps des lieux extraordinaires. J’ai adoré chanter à l’Opéra Garnier, d’ailleurs autant que j’aime y voir des spectacles. Chanter au Staatsoper de Vienne m’a également procuré beaucoup d’émotion. Le public y est incroyable… Car le lieu c’est aussi les gens qui s’y trouvent non ?
Mais paradoxalement, j’avoue que je suis assez sensible au lieux plus intimistes ou aux salles « en plein-air » qui laissent entrer beaucoup de magie et de liberté aux représentations. Pour ces raisons deux endroits dans lesquels j’aimerais beaucoup chanter sont le Théâtre des Bouffes du Nord à Paris et la Cour d’honneur du Palais des Papes à Avignon.
Quels sont vos futurs projets ? Où pourra-t-on vous écouter chanter prochainement ?
Cette saison, je vais reprendre la merveilleuse production d’Alcina de Haendel au Théâtre-des-Champs-Elysées que nous avions crée à Zurich en 2013 avec une équipe du tonnerre. Puis je chanterai ma première Pamina dans La Flûte enchantée de Mozart à l’Opéra de Hambourg et ma première Poppea de Monteverdi dans une nouvelle production de Calixto Bieito à l’Opéra de Zurich. Je chanterai également en concert à Nantes le 24 mars et à Avignon le 9 avril.
Ah oui, et je vais enregistrer mon 2ème disque pour Deutsche Grammophon fin juillet !
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Un grand merci à Julie Fuchs d’avoir pris le temps de se plier au jeu de cette interview. Pour en savoir plus sur son actualité, vous pouvez la suivre sur les réseaux sociaux : Facebook, Instagram et Twitter.
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