Culturez-vous
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Si les musées multiplient les initiatives pour parvenir à toucher un large public et proposent de nombreux services de médiation, ce n’est pas le cas des galeries d’art qui entretiennent – et parfois cultivent avec ardeur – une image fermée et élitiste. Il est vrai que les oeuvres en vente dans ces galeries sont souvent réservées aux plus fortunés. Pourtant, il est possible d’y dénicher des pièces uniques pour quelques centaines d’euros… encore faut-il savoir où chercher !

Pour briser la glace, le club Barter propose de nous “ouvrir les portes du monde de l’art”. Comprenez par là des visites de galeries d’art ou de musées en petit comité, accompagné par un expert qui fera en sorte de nous guider dans une atmosphère conviviale et détendue.
C’est ainsi que le club Barter nous a convié un samedi d’avril à une visite de quelques galeries d’art du Marais, en compagnie d’Elodie Le Dan, ancienne de chez Christie’s. Une vraie découverte pour moi, bien plus habitué à traîner mes guêtres dans les musées que dans les galeries.

Notre parcours nous a mené vers quatre galeries relativement hétérogènes. Elodie Le Dan a en effet souhaité nous montrer aussi bien des galeries célèbres que d’autres plus confidentielles.

 

Chen Zhen, Fragments d’éternité

 

Jusqu’au 7 juin, la Galerie Perrotin propose une exposition rétrospective de Chen Zhen, artiste chinois décédé en 2000. L’artiste a créé ses œuvres autour de réflexions en lien avec l’évolution de la société chinoise. Par exemple, le radeau d’écriture : des livres insérés entre des traverses de chemin de fer symbolisent un voyage entre différentes cultures.

Chen Zhen “Le Chemin / Le Radeau de l’écriture”, 1991 Traverses de chemin de fer, métal, pierres, journaux, livres, peinture acrylique rouge Railway sleepers, metal, stones, newspapers, books, red acrylic paint 60 x 300 x 250 cm
Chen Zhen
“Le Chemin / Le Radeau de l’écriture”, 1991
Traverses de chemin de fer, métal, pierres,
journaux, livres, peinture acrylique rouge
60 x 300 x 250 cm

Exciting Delivery, un vélo traditionnel chinois happé par un dragon de chambres à air représentant les voitures qui se font de plus en plus présentes dans les villes.

Chen Zhen “Exciting Delivery”, 1999 Métal, roues et chambres à air de bicyclettes, voitures miniatures, peinture acrylique noire 250 x 130 x 135 cm
Chen Zhen
“Exciting Delivery”, 1999
Métal, roues et chambres à air de
bicyclettes, voitures miniatures, peinture
acrylique noire
250 x 130 x 135 cm

Un jardin zen méditatif qui met en scène la médecine chinoise vs la médecine occidentale.

Chen Zhen “Zen Garden”, 2000 Albâtre, métal, plantes artificielles, bois, sable, petites pierres, ampoules électriques 175 x 340 x 300 cm
Chen Zhen
“Zen Garden”, 2000
Albâtre, métal, plantes artificielles, bois,
sable, petites pierres, ampoules électriques
175 x 340 x 300 cm

Ou encore “Le bureau de change” : des toilettes publiques grandeur nature transformées en lieu d’affaires sales ! Des pièces sont disposées dans la rigole d’écoulement des eaux usées, celui qui voudra les récupérer devra donc se salir. Chen Zen ironisait : « quand on tire la chasse, tout le monde redevient propre ».

Chen Zhen “Le Bureau de change”, 1996-2004 Bois, métal, eau, pièces de monnaie, verre, lumière 290 x 367 x 423 cm
Chen Zhen
“Le Bureau de change”, 1996-2004
Bois, métal, eau, pièces de monnaie, verre,
lumière
290 x 367 x 423 cm

Cette dernière oeuvre mesure 290 x 367 x 423 cm. L’une des salariées de la galerie nous a expliqué que les acheteurs sont généralement des institutions qui disposent d’espaces suffisamment grands pour accueillir de tels objets.

Seuls quelques happy few pourront avoir accès à ces oeuvres, il faudra par exemple compter 1,5 millions d’euros pour “Round Table – Side by Side”.

Chen Zhen “Round Table - Side by Side”, 1997 Bois, métal, chaises 180 x 630 x 450 cm
Chen Zhen
“Round Table – Side by Side”, 1997
Bois, métal, chaises
180 x 630 x 450 cm

 

JonOne, Evolution to Oils

 

Notre visite se poursuit à la galerie Rabouan Moussion qui expose jusqu’au 24 mai JonOne, street artist américain qui vit à Paris depuis vingt ans. L’artiste est reconnaissable par sa signature JONONE qu’il reproduit sur toute la surface de ses oeuvres.

JonOne à la galerie Rabouan-Moussion
JonOne à la galerie Rabouan-Moussion

Peu à peu, il délaisse le street art et l’acrylique pour se tourner vers la production de tableaux à l’aide de peinture à l’huile. Comme le souligne notre guide, il y a un embourgeoisement du street art, devenu un art que l’on se plaît à accrocher dans son salon.

Ici, les tarifs sont davantage accessibles : de 4 800 à 50 000 € selon la taille du tableau. Quelques petites oeuvres uniques sont même proposées à partir de 300 €.

 

Audrey Casalis, Le Grand Sommeil

 

Audrey Casalis L’être abandonné, Pierre noire sur papier, 10,5 x 7 cm, 2013
Audrey Casalis
L’être abandonné, Pierre noire sur papier, 10,5 x 7 cm, 2013

C’est mon coup de cœur de cette visite ! La Galerie Particulière est loft lumineux, très apaisant. Elle accueillait jusqu’au 3 mai l’artiste Audrey Casalis. Une prise de risque pour cette galerie puisque Audrey Casalis est fraîchement diplômée de l’école des Beaux Arts. La galeriste nous montre le dossier constitué de gravures miniatures que l’artiste lui avait présenté. Le travail est admirable, un coup de coeur pour la Galerie Particulière qui a demandé à Audrey Casalis de produire 70 oeuvres en deux mois et demi.

Challenge réussi : de superbes dessins mêlant noir et blanc grâce à l’utilisation de la pierre noire qui retranscrit un univers passionnant :

 

Je souhaitais travailler sur des ressentis humains à la fois classiques et banals, en soi complètement insignifiants, et qui pourtant gênent, perturbent et finissent par obséder.

Mon travail se fonde sur le noir et le blanc, sur la lumière; non pas seulement sur les contrastes mais aussi sur le noir même, ses reflets, ses épaisseurs. Je cherche aussi à retranscrire l’espace imaginé et ses questionnements : comment représenter les transformations mentales d’un lieu existant, physiquement réel et palpable ?

Je me suis penchée sur l’insomnie angoissante, oppressante, vue comme un traumatisme quotidien. L’insomnie qui obsède durant le jour et fait craindre la nuit. J’ai cherché l’attente de ces moments, la solitude, le vide. Tous ces sentiments qui dépassent l’insomnie et dévoilent nos malaises, nos peurs. Je souhaitais travailler sur des émotions tant éculées qu’insignifiantes et leur rendre hommage, à ma façon. Des équilibres précaires, des solitudes, des abandons, des fragilités toutes humaines qui nous construisent.

 

Ces dessins étaient vendus 600 €.

 

Street art yesterday and today

 

La visite se termine par la galerie Taglialatella. Habituellement spécialisée dans le pop art, elle consacrait jusqu’au 26 avril une exposition dédiée au Street Art. Parmi les œuvres exposées on pouvait trouver des sérigraphies / lithographies de Bansky, Haring, Brainwash

J’étais surpris de découvrir des œuvres de Banksy dans une galerie, j’ignorais qu’il vendait quelques sérigraphies. Côté tarifs, même si la sérigraphie est authentifiée, c’est la présence de la signature qui déterminera le prix de l’oeuvre. Comptez 10 000 € pour une sérigraphie non signée et dans les 15 000 € si les six lettres “Banksy” apparaissent !

Banksy, Trolleys, 2007
Banksy, Trolleys, 2007

 

L’expérience Barter : le verdict

 

Cette balade a duré environ deux heures et j’en suis ressorti moins intimidé par les galeries tout en ayant fait la découverte de plusieurs artistes. Une visite donc enrichissante mais également conviviale. Les discussions, que ce soit avec notre expert ou avec les autres participants, ont été riches et sans tabous, n’hésitant pas à discuter des prix ou des pratiques parfois discutables de collectionneurs qui peuvent arborer davantage une âme de businessmen que d’amoureux d’art.

L’un des crédo de Barter est de pousser les amateurs d’art à se tourner vers les œuvres uniques plutôt que vers les galeries qui vendent de l’art en masse sans grande valeur (Yellow Korner pour ne pas les citer !). Sur ce point, je ressors plutôt convaincu puisque nous avons pu voir des œuvres en vente pour quelques centaines d’euros et donc relativement accessibles pour des passionnés.

En revanche, si Barter est ouvert autant aux simples amateurs qu’aux collectionneurs avertis, il est préférable d’avoir un portefeuille plutôt garni pour profiter pleinement des services proposés. Le club ne s’en cache d’ailleurs pas dans son communiqué de presse : “Nos membres avocats, chefs d’entreprise, consultants, architectes ou travaillent dans les médias et la finance”. Ainsi, cette visite dans les galeries d’art est normalement facturée 49 € par personne mais il faut reconnaître que la balade était instructive et dans des conditions idéales (nous étions seulement 5).

Au-delà de ces visites dans les galeries d’art, Barter propose aussi un accès à l’ArtRoom, un catalogue d’oeuvres en ligne sélectionnées par l’équipe Barter et disponibles à la vente. Barter organise également des événement privilégiés dans des galeries, salons, foires… mais aussi des visites de musées / expositions en groupe restreint (20 personnes) en compagnie d’un médiateur et avec accès coupe-file.
Sur ce dernier service j’avoue être bien moins convaincu. Les visites sont facturées 39 € par personne là où l’association chère à mon coeur Un soir, Un musée, Un verre, propose des visites tout aussi conviviales et dans des conditions qui, parfois, n’ont rien à envier à Barter.

Pour accéder à l’ensemble des services Barter, il vous faudra vous acquitter d’un abonnement de 250 à 900 € par an.

barter-paris-art-club

 

A lire également, l’article du blog Cimaises qui participait aussi à cette balade.

 

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